Depuis la dernière transgression marine du dunkerquois, calé et protégé derrière les digues et son rideau de dunes, modelé par la mer et le vent, le paysage de la plaine littorale s'offre de Calais aux Pays-Bas et présente cette singularité topographique d'être quasiment toujours plan.
Ces terrains aux altitudes très faibles et souvent inférieures à «0» sont des polders. Ils ont été tirés et protégés de l'onde par un labeur incessant amorcé après le VIII ème siècle.
L'équilibre ainsi créé est souvent précaire et l'invasion par l'eau saumâtre reste une éventualité toujours présente.
Maîtriser et contenir l'eau est devenu un acte réflexe. Le fossé ou watergang, la vis d'Archimède, l'éclusette, sont les éléments qui assurent à ces anciens marais des qualités agronomiques et permettent le séjour des hommes.
La spécificité de ce grand paysage est l'horizontalité presque absolue et la très forte densité des fossés sillonnant les cultures.
C'est en référence à l'image que renvoie ce polder que le terme de «plat-pays» trouve ici sa plus judicieuse représentation : le réseau très dense de canaux sillonnant et armant l'ensemble du territoire, tant en milieu urbain qu'en milieu agricole, est plus présent dans les représentations cartographiques que dans le vécu des habitants.
Quel que soit l'itinéraire emprunté en Flandre maritime, il longe ou franchit immanquablement un canal, mais sans le donner à voir ou même le laisser percevoir.
La rigueur topographique confine à l'abstraction. Le vent, la ligne d'eau et l'horizontalité du sol s'allient pour conférer une dimension sublime à ce paysage où l'arbre est rare.
L'industrialisation intensive et l'équipement portuaire industriel et commercial du littoral impliquent une modification importante des composantes paysagères. La propension à l'extension et à la densification de ces activités va jusqu'à remettre en question le statut même de la plaine dans sa platitude,ses dimensions et sa spatialité.
Parcourir la Flandre littorale dans le département du Nord permet d'identifier trois entités paysagères distinctes. En contact avec la mer se déploient d'abord les dunes littorales, puis l'entité paysagère de la plaine canalisée incluant elle-même l'entité des Moëres.
Extrait de la Trame verte, CAUE, 1993