Une banane : c'est par ce mot que le public a rapidement désigné ce type de bâtiment édifié selon une grande courbe, design à la mode dans les années 1970. Cette façon très « bord de mer » d'établir une relation en belvédère face à un ample paysage n'est pas incongrue ici, face à un espace laissé vacant, à la Reyssouze et au talweg remontant vers la ville ancienne.
Sa façade principale est caractérisée par l'exacerbation des lignes horizontales des gardes corps des balcons et la force des montants les soutenant. Sa façade arrière s'anime au gré des ombres que dessine le soleil sur les innombrables brises vues verticaux. L'une et l'autre illustrent l'inspiration que trouvent les architectes auprès de plasticiens alors à la recherche d'une mise en vibration optique de simples traits comme des volumes les plus puissants.
Monumentalisé à dessein pour transmettre l'idée de solidité qui séduit le candidat acquéreur, hérissé de formes anguleuses qui lui donnent une puissance apte à flatter l‘égo des propriétaires, l'immeuble évite le hors d'échelle en se fragmentant en trois volumes. Ceci résulte de l'introduction de cet étonnant bloc central où se superposent la chaufferie, le logement du gardien et une salle collective pour les copropriétaires.
De part et d'autre, se développement les 96 logements (16 T2, 32 T3, 32 T4, 16 T5) qui ne déterminent en rien un rythme de façade. En revanche sur la façade arrière, les séquences vitrées des escaliers intérieurs subdivisent chacune des deux masses en sous ensembles, que ceinture une fine galerie couverte. Le parking semi-enterré signe l'amorce d'une relation nouvelle à l'automobile mais exprime aussi la proximité de la rivière et la volonté d'éviter d'onéreux cuvelages étanches. Ce projet a été supervisé par l'urbaniste en chef de la ville, Jean Royer qui a aidé Jean Poupon à déterminer l'implantation du programme sur le site et la volumétrie de la construction.
En effet, le premier projet déposé en mairie pour accord préalable le 30 septembre 1964 développe un grand volume courbe de cinq niveaux, flanqué d'un volume rectangulaire de sept niveaux. Projet rejeté car le volume de sept niveaux dépasse la hauteur autorisée dans cette zone.
Le permis de construire est déposé, cinq ans plus tard seulement, en octobre 1969, et les travaux sont réalisés en quatre tranches successives échelonnées entre 1972 et 1975. L'immeuble est pensé pour être construit (murs et planchers) en béton armé de 15 cm d'épaisseur, les cloisons intérieures des appartements étant en briques de 5 cm, prestations courantes à cette époque. L'école projetée à ses pieds dans le cadre de la ZAC n'ayant pas été réalisée, l'Arc-en-Ciel garde ses distances.
Etape du 2ème parcours d'architecture XXe l'Ain.